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voix ; la musique, cet art enchanteur, lui auroit-elle appris à sentir ?

J’apperçôis deux danseuses autour de l’arche de Jephté : dans l’une, quelle agilité, quelle force, quelle précision ! seroit-ce un homme déguisé ? elle m’étonne à un tel point, que je vois à peine le plaisir qui la suit. L’autre, plus séduisante, forme des pas mesurés par les grâces, & composés par les amours. Est-ce Terpsicore, ou la volupté en personne ? Divine enchanteresse, quel cœur de bronze & de diamant ne seroit pas pénétré de la lasciveté de tes mouvemens ? Étends, déploie seulement tes beaux bras, & je suis plus enchanté qu’Amadis même.

Atis nouvel Atis, tu pouvois seul me consoler de la perte de ce genre de volupté. Quels sons ! quel désespoir ! quel cris : « Atis, Atis lui-même a fait périr ce qu’il aime » ; il ne chante ses douleurs que pour les rendre plus vives. Cher & aimable Jeliotte, sers-toi de tout l’empire que tu as sur les cœurs sensibles : attendris les plus durs & les plus inflexibles ; non, jamais la puisisance d’Orphée n’égala la tienne.

Quelies formes encore une fois l’amour ne prend-il pas pour se glisser dans nos âmes ? Il suscite les intrigues, & toutes les aventures galantes qui composent nos romans ; il permet à l’imagination des