Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome troisième, 1796.djvu/82

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

malheureux amant d’Issé, pour se payer des larmes que la cruelle lui a fait verser ?

Tantôt sous la forme du temple de Gnide, un philosophe de la fabrique de Chaulieu offre à nos esprits enchantés la peinture de l’amour la plus vive & la plus voluptueusement délicate. Plein du dieu qui l’inspire, à force d’en sentir les attraits, il nous en fait adorer la puissance. Comme il peint encore les plaisirs des Persans, ces heureux mortels, qui ne couronnent que la lubricité, & n’offrent des prix qu’à ceux qui auront inventé des voluptés nouvelles ! Certes, la palme offerte a rarement été mieux méritée que par ce voluptueux philosophe. C’est ainsi qu’un sage ose quelquefois ouvrir lui-même une école de volupté. Eh ! quel autre en effet doit apprendre aux mortels le secret d’être heureux ? Disciple d’Épicure, accourez tous, & rendez hommage à un maître plus digne de vous.

Tantôt l’amour même séduit les cœurs par l’art de Protée ; que n’imagine-t-il point pour peupler son empire ? Il s’ébat sur un sopha, théâtre de ses plaisirs, aussi commode que discret ; s’il dicte des billets doux & des lettres galantes, un dieu plus galant encore, Mercure, est prêt à les porter : il oublieroit plutôt son caducée que de ne pas les rendre adroitement aux beautés à qui elles sont adressées. Anacréon, Quinaut, Chaulieu, le vo-