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de la vie ? Non ; le plaisir est si étroitement lié au bonheur, que ces deux choses ont été confondues ensemble en différens siècles. Le sage doit donc chercher le plaisir, sans lequel il ne peut être heureux. Que le crime se couvre de honte ; le plaislr & l’amour ne sont point de sa bande. Voyez tout le brillant cortège de la joie, elle ne marche qu’escortée des jeux & des ris ; la probité l’accompagne ; elle est le symbole de la pureté du cœur : le scélérat est triste & rêveur, en proie aux plus cruels remords ; la loi naturelle qu’il a violée, le déchire à son tour. L’honnête homme rit, épanouit son cœur il aime tant le plaisir & la volupté, que loin de rougir d’être sait pour la sentir, il la regarde comme la plus solide récompense de la vertu, & le plus beau partage de la raison. Le plaisir, dit un auteur, qui m’en sait beaucoup, « est le seul bien réel qu’un honnête homme ait en ce monde »,

Plaisir, maître souverain des hommes & des dieux, devant qui tout disparoît, jusqu’à la raison même, tu sais combien mon cœur t’adore, & tous les sacrifices qu’il t’a saits ; je ne sais si je mériterai d’avoir part aux éloges que je te donne ; mais je me croirois indigne de toi si je n’étois attentif à m’assurer de ta préscnce, & à me rendre compte à moi-même de tous tes biensaits. Oui, sans doute, je te dois de trop heureux momens pour ne faire