Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome troisième, 1796.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour ne pas coucher, ou peut-être mourir (car qu’en fais-je ?) à la porte du temple ! Combien d’autres, excités par une simple curiosité philosophique, rentrant enfuite dans leur devoir, ont si bien servi le véritable amour, que pour ses propres intérêts, ce dieu des cœurs, en bon casuiste, n’a pu quelquefois se dispenser de leur accorder conditionnellement une indulgence dont il profitoit.

Vous avez de l’esprit, Céphise ! & vous êtes révoltée par ces discours : vous vous piquez d’être philosophe, & vous vous feriez un scrupule d’user d’une ressource permise par Sanchez, & autorisée par l’amour ! Quels feroient donc vos préjugés, si comme tant d’autres femmes, vous aviez le malheur de n’être que belle ! ah ! croyez-moi, chère amante, l’empire de l’amour ne reconnoit d’autres bornes que les bornes du plaiiir.

Mais, Céphise, vous le savez, & ce seul trait doit désarmer votre colère, vous vous souvenez du tribut amoureux que Pétrone rendit à des charmes semblables aux vôtres, dans cette nuit de délices, dont il semble avoir conservé tous les transports. Quels plaisirs son ombre enveloppoit ! Le peintre passionné prend les dieux & les déesses, pour témoins de son bonheur : non, jamais les plus heureux habitans de l’Olympe n’ont goûté de si grands biens. Que de mollesse ! que de volupté ! quelle jouissance ! grands dieux, pourquoi qui fait