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on peut prendre une amante ; le plaisir le lasse de mentir.

La vue des plaisirs d’autrui nous en donne. Avec quel air d’intérêt la curieuse Suzon regarde les mystères d’amour ! Plus elle craint de troubler les prêtres qui les célèbrent, plus elle en est elle-même troublée ; mais ce trouble, cette émotion ravit son âme. Dans quel état la friponne est trouvée ! Trop attentive, pour n’être pas distraite, elle semble machinalement céder à la voluptueuse approche des doigts libertins ! Pour la désenchanter, il lui faudroit des plaisirs, tels sans doute que ceux dont elle a devant soi la séduisante image. L’amour se gagne à être vu de près.

Oserois-je légèrement toucher des mystères secrets dont le seul nom offense Vénus, & sait prendre les armes à tout Cythère, mais qui cependant ont quelquefois le bonheur de plaire à la déesse, par l’heureuse application qu’on en fait ?

Le beau Giton gronde le satyre qu’il a choisi pour ses plaisirs : tout enfant qu’il est, il s’apperçoit bien de l’infidélité qu’Ascylthe lui a faite : il donne à son mari plus de plaisir qu’une femme véritable : est-il surprenant qu’il mette ses faveurs au plus haut prix, & que le plus joli cheval, le coursier de Macédoine le plus vite puisse à peine les payer ?