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La nature prend-elie ses habits de printemps ? prenons, dit-il, les nôtres ; faisons passer dans nos cœurs l’émail des prés & la verte gaieté des champs. Parons notre imagination des fleurs qui rient à nos yeux. Belles, parez-en votre sein, c’est pour vous qu’elles viennent d’éclore ; mais prenez encore plus d’amours que de fleurs. Enivrez-vous de tendresse & de volupté, comme les prés s’enivrent de leurs ruisseaux. Chaque être vous adresse la parole ; seriez-vous sourdes à la voix, à l’exemple de la nature entière ? Voyez ces oiseaux : à peine éclos, leurs ailes les portent à l’amour ! Voyez comme ce dieu badin folâtre sous la forme de Zéphire autour de ce verd feuillage ! Les fleurs même se marient ; les vents sont leurs messagers amoureux. Chaque chose est occupée à se reproduire.

Vous, qui avez tant de sentiment, Corine… venez. Si l’instinct jouit plutôt que l’esprit, l’esprit goûte mieux que l’instinct.

Qu’un simple bouquet a de charmes pour un amant ! L’amour est-il niché dans ces fleurs ? Daphnis croit le respirer lui-même ; on diroit qu’il veut l’attirer dans son cœur par une voie nouvelle. Mais quel feu secret ! Quelle douce émotion ! Et quelle en est la cause ? C’est qu’il étoit contre le cœur de sa chère Thérèse. En reçoit-elle un à son