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Que j’aime à le voir, las de voltiger comme un oiseau du lys à la rose & de l’ivoire au corail, se reposer enfin sur votre belle gorge ! On l’y poursuit, il n’y est déjà plus. Par où s’est-il glissé ? Où se cache-t-il ? Par-tout où habite la beauté. Il s’est fait une dernière retraire, c’est là qu’il aime à s’arrêter, « comme une tendre fauvette sur ses petits ». Poursuivez-le encore : à l’air dont il demande grâce, qu’on voit bien qu’il n’en veut point avoir ! Il ne semble se fixer au siège de la volupté, il n’est bien aise que son empire ait des bornes, que pour avoir le plaisir de s’y laisser prendre, & ne pas manquer d’excuse.


Transportons-nous à l’opéra ; la volupté n’a point de temple plus magnifique, ni plus fréquenté. Quelles sont ces deux danseuses autour de l’arche de Jephté ? Dans l’une, quelle agilité, quelle force, quelle précision ! Le plaisir la suit avec les jeux & les ris, son escorte ordinaire : l’autre, moins étonnante, seduit plus ; ses pas sont mesurés par les grâces & composés par les amours. Quelle moëlle, quelle douceur ! L’une est brillante, légère, nouvelle ; l’autre est ravissante, inimitable. Si Camargo est au rang des nymphes, vertueuse Salé, vous ornerez le chœur des grâces. Divine enchanteresse, quelle âme de bronze n’est pas pénétrée de la mollesse de tes mouvemens ? Étends, déploie