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jusqu’aux moindres discours que tu soupirois la première sois… Quel combat enchanteur de la vertu, de l’estime & de l’amour ! comme à des mouvemens ingrats il en succéda peu-à-peu de plus doux qui ne t’inquiétoient pas moins ! je vois tes paupière mourantes, prêtes à fermer des yeux adoucis, attendris par l’amour. Le rideau du plaisir fut bientôt tiré devant eux ; la force t’abandonnoit avec la raison, tu ne voyois plus, tu ne savois ce que tu allois devenir, tu craignois ; hélas ! que cette simplicité ajoutoit à tes charmes & à mon amour ; tu craignois de tomber en foiblesse, & de mourir au moment même que tu allois verser bien d’autres larmes que les premières, que tu allois sentir le bien-être & le plus grand des plaisirs. De quelle volupté encore ta tendresse fut suivie ! Quels nouveaux & violens transports ! Dieux jaloux ! respectez l’égarement d’une mortelle charmante qui s’oublie dans les bras qu’elle adore, plus heureuse ! que dis-je ! plus déesse en ces momens que vous n’êtes dieux ! Amour, tu ne l’es toi-même que par nos plaisirs !

Quel autre pinceau que celui de Pétrone pourroit peindre cette première nuit !… Quels plaisirs enveloppa son ombre voluptueuse ? quelle extase ! que de jouissances dans une ! Brûians d’amour, collés étroitement ensemble, agités, immobiles, nous nous communiquions des soupirs de feu ; nos