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phire. Je vois sa bouche de rose faire un doux mouvement vers la vôtre : ses beaux bras s étendent avec une mollesse dont le simple réveil ne peut se faire honneur ; ses mains commencent à s’égarer comme les vôtres, par-tout où l’instinct d’amour les conduit. Plus réveillée qu’endormie, plus doucement émue que vivement agitée, il est temps de passer à des mouvemens qui ne seront pas plus ingrats qu’elle. Flore y répond… Doucement, doucement, Tircis… point encore… Elle se soulève à peine… Mais que vois-je ! Un de ses beaux yeux s’est ouvert ; votre air de volupté a passé dans son âme, ses baisers sont plus vifs, ses mains plus hardies… J’entends des sons entrecoupés… Heureux Tircis, que tardez-vous ? Tout est prêt jusqu’au plaisir.

Quels plaisirs, grands dieux ! que ceux de l’amour ! peut-on appeler plaisir tout ce qui n’est pas l’amour ? Heureux ces vigoureux descendans d’Alcide qui portent dans leurs veines tous les feux de Cythère & de Lampsaque ! pour eux la jouissance est un vrai besoin renaissant sans cesse ; mais plus heureux encore, ceux dont l’imagination vive tient toujours les sens dans l’avant-goût du plaisir, & comme à l’unisson de la volupté ! Pour ces amans tous les jours se lèvent sereins & voluptueux : examinez leurs yeux, & jugez, si vous pouvez, s’ils vont au plaisir ou s’ils en viennent. Si les préludes