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de grâces qui agissent sur lui avec toute la force de leur aimant ; il voudroit jouir d’une amante endormie… déjà il s’y dispose avec toutes les précautions & l’industrie imaginables, mais en vain ; le cœur de Phylis est averti des approches de son bonheur, un doux sentiment l’annonce de veine en veine ; ses pores, sensibles à la plus légère titillation, s’ouvriroient à l’haleine de Zéphire. Il étoit temps, bergère, les transports de votre amant touchoient à leur comble : il n’étoit plus maître de lui. Ouvrez donc les yeux, & acceptez avec plaisir les signes du réveil. « C’est moi, dit-il, c’est ton cher Hylas, qui t’aime plus qu’il n’ait fait de sa vie ». Il se laisse ensuite tomber mollement dans vos bras, qu’un reste de sommeil vous fait étendre & ouvrir à la voix de l’amour ; il les entrelacera dans les liens ; il s’y confondra de nouveau. C’est ainsi qu’à peine rendue à vous-même, vous sentirez, la volupté du demi-réveil. L’homme a été fait pour être heureux dans tous les états de la vie.

C’est assez, profès voluptueux, l’amour ne perd rien à tous les sermens qu’il fait faire ; jurez à votre maitresse que vous lui serez fidèle, & levez-vous. C’est ici qu’il faut s’arracher au plaisir que les regrets accompagnent. N’attendez pas les pleurs ni les plaintes d’une belle qui touche au moment de vous perdre, arrachez-vous encore une fois, & n’excitez point des désirs superflus. Les plaisirs for-