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que d’habiles charlatans dans des siècles ignorans, ont passé pour faire de grands miracles ! La belle âme & la puissante Volonté qui ne peut agir, qu’autant que les dispositions du corps le lui permettent, & dont les goûts changent avec l’âge & la fièvre ! Faut-il donc s’étonner si les philosophes ont toujours eu en vue la santé du corps, pour conserver celle de l’âme ? si Pythagore a aussi soigneusement ordonné la diète, que Platon a défendu le vin ? Le régime qui convient au corps, est toujours celui par lequel les médecins sensés prétendent qu’on doit préluder, lorsqu’il s’agit de former l’esprit, de l’élever à la connoissance de la vérité & de la vertu ; vains sons dans le désordre des maladies & le tumulte des sens ! Sans les préceptes de l’hygiène, Épictète, Socrate, Platon &c. prêchent en vain : toute morale est infructueuse, pour qui n’a pas la sobriété en partage ; c’est la source de toutes les vertus, comme l’intempérance est celle de tous les vices.

En faut-il davantage, (& pourquoi irois-je me perdre dans l’histoire des passions, qui toutes s’expliquent par l’ενοϱμων d’Hippocrate) pour prouver que l’homme n’est qu’un animal, ou un assemblage de ressorts, qui tous se montent les uns par les autres, sans qu’on puisse dire par quel point du cercle humain la nature a commencé ? Si ces ressorts diffèrent entr’eux, ce n’est donc que par leur siège, &