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enfin parce que tout est froid & affaissé dans les cadavres. Si les dissections se faisoient sur des criminels suppliciés, dont les corps sont encore chauds, on verroit dans leur cœur les mêmes mouvemens, qu’on observe dans les muscles du visage des gens décapités.

Tel est ce principe moteur des corps entiers, ou des parties coupées en morceaux, qu’il produit des mouvemens non déreglés, comme on l’a cru, mais très-réguliers, & cela, tant dans les animaux chauds & parfaits, que dans ceux qui sont froids & imparfaits. Il ne reste donc aucune ressource à nos adversaires, si ce n’est de nier mille & mille faits que chacun peut facilement vérifier.

Si on me demande à présent quel est le siége de cette force innée dans nos corps ; je réponds qu’elle réside très-clairement dans ce que les anciens ont appellé parenchyme, c’est-à-dire dans la substance propre des parties, abstraction faite des veines, des artères, des nerfs ; en un mot, de l’organisation de tout le corps ; & que par conséquent chaque partie contient en soi des ressorts plus ou moins vifs, selon le besoin qu’elles en avoient.

Entrons dans quelque détail de ces ressorts de la machine humaine. Tous les mouvemens vitaux, animaux, naturels, & automatiques se font par leur action. N’est-ce pas machinalement que le corps se retire, frappé de terreur à l’aspect d’un précipice