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cela, si ce n’est par un vice des organes de la parole ?

Mais ce vice est-il tellement de conformation, qu’on n’y puisse apporter aucun remède ? En un mot seroit-il absolument impossible d’apprendre une langue à cet animal ? Je ne le crois pas.

Je prendrois le grand singe préférablement à tout autre, jusqu’à ce que le hasard nous eût fait découvrir quelqu’autre espèce plus semblable à la nôtre, car rien ne répugne qu’il y en ait dans des régions qui nous sont inconnues. Cet animal nous ressemble si fort, que les naturalistes l’ont apellé homme sauvage, ou homme des bois. Je le prendrois aux mêmes conditions des écoliers d’Amman ; c’est-à-dire, que je voudrois qu’il ne fût ni trop jeune, ni trop vieux ; car ceux qu’on nous apporte en Europe, sont communément trop âgés. Je choisirois celui qui auroit la physionomie la plus spirituelle, & qui tiendroit le mieux dans mille petites opérations, ce qu’elle m’auroit promis. Enfin, ne me trouvant pas digne d’être son gouverneur, je le mettrois à l’école de l’excellent maître que je viens de nommer, ou d’un autre aussi habile, s’il en est.

Vous savez par le livre d’Amman, & par tous ceux[1] qui ont traduit sa méthode, tous les pro-

  1. L’auteur de l’histoire naturelle de l’âme &c.