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vingt ans, dit-il, que je connois le roi ; il est naturellement bon & même foible ; mais j’ai observé qu’un rien l’impatiente & le met en fureur, lorsqu’il fait froid.

Tel peuple a l’esprit lourd & stupide ; tel autre l’a vif, léger, pénétrant. D’où cela vient-il ? si ce n’est en partie, & de la nourriture qu’il prend, & de la semence de ses pères[1], & de ce chaos de divers élémens qui nagent dans l’immensité de l’air ? L’esprit a, comme le corps, ses maladies épidémiques & son scorbut.

Tel est l’empire du climat, qu’un homme qui en change, se ressent malgré lui de ce changement. C’est une plante ambulante, qui s’est elle-même transplantée ; si le climat n’est plus le même, il est juste qu’elle dégénère, ou s’améliore.

On prend tout encore de ceux avec qui l’on vit, leurs gestes, leurs accens &c. comme la paupière se baisse à la menace du coup dont on est prévenu, ou par la même raison que le corps du spectateur imite machinalement, & malgré lui, tous les mouvemens d’un bon pantomime.

Ce que je viens de dire prouve que la meilleure compagnie pour un homme d’esprit, est la sienne,

  1. L’histoire des animaux & des hommes prouve l’empire de la semence des pères sur l’esprit, & le corps des enfans.