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que j’ai en horreur ; en vain elle s’efforceroit de rejeter sur la corruption du cœur, ce qui n’est visiblement qu’un jeu d’imagination, & de me supposer enfin des goûts que je n’eus jamais, sous le méchant & faux prétexte que c’est plutôt au vice favori de Pétrone, qu’à Pétrone même, que j’ai donné des éloges. Ne craignons point de vils & trop puissans calomniateurs ; ceux qui ont l’esprit droit et le cœur bon, s’armeront contr’eux, & prendront ma défense. Aussi partisans de la vraie vertu, que jurés ennemis de la superstition, se connoissant en ouvrages de goût, pleins de sentimens pour l’humanité, ils verront aisément que c’est ici le triomphe de ce tendre amour que la nature suffit pour légitimer, & le tombeau du monstre qui la dépeupleroit. Oui, je le répète, le plus tendre & le plus fidèle amour, l’amour seul m’a prêté son pinceau. Si un sentiment vif des plus heureux momens de ma vie, me les a vivement retracés ; si j’ai trempé ma plume dans le feu d’une imagination prompte à s’allumer, ô vous tous qui avez senti la volupté ! dites, si je pouvois en parler avec moins d’extase & de transports ; dites enfin, vous seuls êtes dignes de me juger ; dites, si sans monter le sentiment sur l’échasse des vers, je n’ai pas dû, pour vous plaire & mieux la célébrer, réunir toutes les forces de mon foible génie, pour m’élever sans rime, comme sans ordre, au sublime de la poésie.