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DE l’Ame. 213

Conor, je ne dis pas de morale , mais de leur état , qui a palTé comme un fonge , ou plutôt , fuivant rexpreflîon proverbiale , comme un rêve à la fu !{re,qui pourroit durer cent ans fans nous donner une feule idée. Cependant ce font des hommes, & tout le monde en convient. Pourquoi donc les fatyres ne feroient-ils que des animaux ? S’ils ont les inftrumensde la parole bien organifés, il eft facile de les indruire à parler & à pcnfcr, comme les autres fauvages : je trouverois plus de difficulté à donner de Icdacation & : des idées aux fourds de naiiTance.

f Pour qu’un homme croie n’avoir jamais eu de commencement , il n’y a qu’à le féqueftrer de bonne-heure du commerce àcs hommes ; rien ne pouvant l’éclairer fur fon origine , il croira ncn- . feulement n’être point né , mais même ne jamais finir. Le fourd de Chartres qui voyoit mourir fes femblables, ne favoit pas ce que c’ctoit que la mort : car n’en pas avoir une perception bien difiinSe , comme M. de F. en convient, c’ell n’en avoir aucune idée. Comment donc fe pourroit-il faire qu’un fauvage qui ne verroit mourir perfonne , fur- tout de fon efpece, ne fe crût pas immortel ? Lorfqu’un homme fort de Ion état de bête , & qu’on l’a aflez inftruit, pour qu’il com.mence à réfléchir , comme il n’a point penfé durant le cours de fa vie fauvage , toutes les circonllances de cet