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des miniatures de lacs bleus et profonds où viennent boire les cerfs. Au bord de ces belles eaux, des frênes, des platanes, de larges peupliers pareils aux peupliers d’italie, mêlent amoureusement leur feuillage. . . . . . . . . . . . . . . . . . » Notre camp est curieux à voir. Mes hommes ont mis en œuvre toute leur industrie. En quelques heures, des salles de verdure, des baraques de toutes formes se sont élevées comme par magie. En avant de ma tente, ils m’ont construit un vrai salon avec des branches de peupliers. Vingt personnes au moins pourraient y tenir. Sous ce feuillage que le soleil ne peut pénétrer, les éternelles brises de ce beau pays m’ont fait un paradis de mon palais agreste… Je suis sûr de regretter le Saric. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . » Notre situation empire : l’hostilité devient plus vive. Elle est menaçante. Nos hommes se préparent à une marche de quatre-vingts lieues, la prudence m’oblige à te cacher pour quelle destination. On raccommode avec un goût plus ou moins fantasque de poétiques guenilles. À défaut de souliers, on fabrique des sandales. Nous avons monté nos deux pièces de canon, en forgeant jusqu’au moindre clou ! Atelier de charron, de forgeron, de sellier, de fondeur, de cordonnier, tout cela s’est improvisé dans les salles effondrées. Les ombres des moines morts ont dû bien s’étonner dans leurs caveaux ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . » Je ne saurais trop le redire, mes Français se sont montrés magnifiques dans celle lutte de l’industrie contre le désert, de la patience contre mille difficultés, contre un imprévu plein d’irritation… L’esprit du corps est excellent, nous partons selon toute apparence dans sept à huit jours… »

Les lettres au colonel et au général venaient à peine de partir que le préfet de l’Altar, dans la juridiction duquel se trouve le Saric, donna communication à M. de Raousset d’un ordre envoyé par le gouverneur, ordre qui interdisait aux juges de l’Altar et de San Ignacio de mettre la compagnie en possession d’aucun terrain ou