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À la nouvelle de ce départ, une vive opposition se manifesta sur-le-champ ; les officiers s’opposèrent à l’unanimité au départ de leur commandant. Sachant tous combien M. de Raousset tenait à donner, à M. Levasseur surtout, les preuves les moins équivoques de l’irréprochable loyauté qui présidait à ses actes, ces messieurs voulurent le dégager de toute responsabilité. Ils écrivirent collectivement au ministre de France, lui déclarant avec franchise que s’ils s’opposaient au départ de leur chef, c’est qu’ils redoutaient pour lui, soit un guet-apens sur la route, soit une détention à Arispe.

Ceci s’était passé dans la matinée du 16. Malgré cette opposition, M. de Raousset insista de nouveau pour qu’on le laissât libre de partir ; M. Giménez se joignit à lui et fit valoir des raisons nouvelles qui entraînèrent une faible majorité dans le conseil des chefs de section. Le voyage d’Arispe fut résolu.

Avant de partir, M. de Raousset adressa au ministre de France, à Mexico, une lettre qui se terminait par ces mots :

» C’est à cause de vous, monsieur le ministre, à cause de vous seul, que je prends au sérieux une autorité arbitraire, inique, méprisable, prostituée aux intérêts personnels.

» Vous comptez sur moi, monsieur le ministre, pour faire respecter, estimer le nom français ; c’est pour cela que je vais à Arispe. Je ne veux pas laisser à ces hommes l’ombre même d’un prétexte pour injurier ce grand nom de la France que nous portons avec nous.

» Je suis entouré de pièges, d’intrigues, de trahisons, et, par respect pour vous, monsieur le ministre, je vais au milieu même de ceux qui cherchent à me détruire.