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VI

Découragé par tant de mécomptes, lassé de luttes, dégoûté du gâchis, comme il disait en sa langue énergique et colorée, Gaston revint à Paris dans les premiers jours de mai 1850. À ce moment, la Californie tournait toutes les têtes. Des récits fantastiques arrivaient par chaque courrier d’Amérique sur ce pays de l’or, où la fortune avait de si étranges caprices. Un jour suffisait quelquefois, disait-on, pour faire du dernier des misérables l’égal du financier le plus opulent. Les matelots désertaient les navires pour courir aux mines fabuleuses ; les soldats, envoyés à leur poursuite, rompaient les rangs, jetaient bas les armes et creusaient le premier filon venu. À l’arrivée de M. de Raousset, Paris comptait déjà une vingtaine de sociétés californiennes.

M. de Raousset avait trente-deux ans ; le temps des étourderies était passé. Il commençait à voir la vie sous un jour nouveau, et précisément à ce moment, où il eût eu besoin de grandes ressources pour des entreprises sérieuses, il se trouvait réduit en quelque sorte à l’indigence. Il n’était pas homme à se lamenter les bras croisés. Son parti fut bientôt pris ; il irait demander au nouveau monde cette fortune que la vieille Europe et la jeune Afrique avaient dévorée.

Il fit appel à quelques amis, s’équipa rapidement, et prit courageusement, à bord d’un steamer anglais, un