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Le lendemain, après avoir écrit son testament, il fit de nouveau appeler M. Pannetrat.

« Mon ami, lui dit-il, j’ai mis en ordre, toutes mes petites affaires. Je n’ai plus maintenant à m’occuper de ce monde. Y a-t-il dans cette ville un prêtre éclairé que je puisse faire appeler ? »

M. Pannetrat lui nomma le curé de Guaymas, don Vicente Oviédo, un des rares prêtres qui honorent le clergé mexicain, le plus ignorant et à coup sûr le plus sordide clergé du monde.

M. de Raousset passa trois heures avec don Vicente : au moment de le quitter :

« Surtout, mon Père, lui dit-il, ne m’oubliez pas demain, ce sera sans doute de bonne heure… Je serai heureux de vous serrer la main une dernière fois. »

M. Calvo fut introduit à son tour. L’entrevue fut froide et réservée des deux parts. Le comte lui remit ses lettres, son testament, et divers papiers. M. Calvo s’engagea sur l’honneur à les faire parvenir à leur adresse. En échange, M. de Raousset lui écrivit une lettre dans laquelle il rétractait tout ce qu’il avait dit ou écrit autrefois contre lui.

Cette affaire faite, le consul allait se retirer lorsque le comte l’arrêtant ;

« Vous connaissez sans doute les lois du pays ? lui demanda-t-il, comment fusille-t-on un homme, ici ?

— Mais, répondit le consul avec embarras… je crois qu’on lui bande les yeux et qu’il reçoit la mort à genoux.

— À genoux ! les yeux bandés ! s’écria M. de Raousset, on n’attend pas cela de moi j’imagine ? Il faut voir le gouverneur, Monsieur, il faut le voir tout de suite ! Cela ne se peut pas, comprenez-vous ? »