Page:La Madelène - Le comte Gaston de Raousset-Boulbon, sa vie et ses aventures, 1859.djvu/117

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Deux mois avant, M. de Raousset avait dit à ses hommes :

« Votre union, votre organisation, votre bon droit, votre constance, votre courage, vous rendent tellement forts, que vous ne pouvez plus être vaincus que par vous-mêmes. La compagnie ne peut périr que par suicide ! »

Il s’était trompé ; la compagnie n’avait d’autre lien que lui. Sans lui, elle se sentait isolée, perdue, au milieu d’un pays qu’elle faisait trembler devant elle. En présence de cet affaiblissement moral, la prudence ne permettait pas une plus longue occupation d’Hermosillo, et ce fut le désespoir dans l’âme que M. de Raousset donna l’ordre de rallier Guaymas. Guaymas était une ville ouverte, dont l’occupation ne devait pas coûter une goutte de sang ; la compagnie y trouverait des approvisionnements, elle pourrait s’y fortifier et attendre les renforts annoncés de San Francisco et Mazatlan : c’était une dernière espérance.

Les blessés ne pouvant être transportés, on dut les laisser à Hermosillo ; don Manuel Gandara, gouverneur provisoire, les prit solennellement sous sa sauvegarde ; ils furent confiés, de concert avec lui, à D. J. M. Portillo, l’un des premiers négociants de la ville. M. de Raousset écrivit en outre à Mme Aguilar, afin d’appeler sur eux la protection spéciale et les soins des dames d’Hermosillo. Il rendit à la liberté, sans autre objet que d’assurer une protection de plus aux blessés, les officiers mexicains qu’il avait entourés de tous les soins possibles. Ces dispositions prises, la compagnie se mit en marche ; M. de Raousset, demi-mort, était porté en litière.