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Si la lutte s’engageait, les pueblos devaient se prononcer pour les Français, qui, autant que possible, devaient s’emparer d’une ville importante. D’abord, on devait se borner à demander justice pour l’émigration, mais si le gouvernement prolongeait sa résistance, on proclamerait l’indépendance de la Sonore, et le gouvernement nouveau appellerait à lui l’émigration française de Californie.

Tout fut promis de part et d’autre, mais si chaude que fût la sympathie des pueblos, M. de Raousset ne se faisait point d’illusions sur la nature de leur concours. Rompus à l’obéissance passive, pliés par l’aristocratie, ignorants, timides, sans caractère, sans vigueur, on n’en pouvait espérer d’initiative. Les Français devaient se résigner à courir seuls les premières chances de la guerre. Vaincus, l’abandon de leurs amis était une certitude ; vainqueurs, ils pouvaient compter sur un dévouement qui n’entraînait plus de péril. L’appui matériel n’existait donc pas, mais l’appui moral était considérable pour deux cent cinquante hommes engagés comme l’étaient les Français.

De son côté, le gouvernement sonorien ne perdait pas de temps et avait de longue main pris ses dispositions. Dans les villes d’Hermosillo et de Ures, les gardes nationaux s’exerçaient depuis deux mois au maniement des armes. Quelques centaines d’Indiens avaient été recrutés dans le Rio Jaqui et chez les Opatas, la tribu guerrière par excellence ; les garnisons des présidios ne conservaient que les hommes hors d’état de faire une campagne ; les troupes se concentraient à Arispe. Un fait important à constater, c’est que dans le nord, et généralement parmi ce que les Sonoriens appellent gente de razon, toutes les tentatives, mesures et ordres donnés par le gouvernement