France et en tirer une grosse somme. Après le départ de Franche-Corde et des boucaniers, le serpent croque-rat Grand-Merci s’étant avisé de rentrer dans le fort, il l’avait fait fusiller sans miséricorde, et sa fureur kosaque n’avait pas même épargné le joli maki à fraise Colifichet, délices de la garnison.
— Et je ne pourrai jamais larder ces gens-là, mille cornes de licorne !… Les Stéphanof, les Luxeuil, la race des traîtres et des faquins se tirera toujours de presse !
— Oh ! dit Flèche-Perçante en souriant, moi, je ne me plains pas aujourd’hui… La guerre ! la guerre !… je veux bien la guerre… Mais vos duels… j’en ai trop peur, mon doux maître !
— Brave princesse, bonne fille !… dit le chevalier en lui donnant une tape amicale sur la joue. Au fait ! le Luxeuil m’aurait tué peut-être, ce qui n’eût pas arrangé les affaires d’Anossi ; au lieu de ça, il emporte de moi un petit souvenir qui lui démangera plus d’une fois à la découverte des terres australes.
Luxeuil, de son côté, trépignait de rage ; il osa s’en prendre au commandant Kerguelen. Celui-ci le regarda froidement, ne répondit rien et fit appeler le sieur Vahis.
— Misérable coquin ! dit-il à ce dernier ; Stéphanof, votre complice, avec qui je comptais vous confronter, nous a échappé fort malheureusement !… Je vais donc en finir avec vous !
— Grâce ! commandant ! grâce !… Qu’ordonnez-vous ? que voulez-vous encore ?
— Je veux que vous disiez en face à cet officier ce que vous avez vingt fois écrit en toutes lettres sur son compte dans vos derniers rapports.
— Mais, commandant, je…
— Parlez !… dit Kerguelen de sa voix tonnante.
— C’est un… c’est un… balbutia Vahis.
— Achevez distinctement !
— Un calomniateur !… dit le garde-magasin avec effroi.