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— 342 .—- CHRONIQUE ARTISTIQUE Lès secrets de Rubens, par Léon Lequime. Monnom, Bruxelles. — Pastel et Pastel listes, par Albert Dutby. Siffer, Gand. — James Ensor, avec un dessin d'Ensor, par Eugène Demolder. Lacomblez, Bruxelles. — Au Salon de Gand. L'étude que publie M. Lequime, sous ce titre alléchant : Les Secrets de Rubens, n'est qu'un chapitre détaché d'un travail plus étendu, dans lequel M . Lequime, comme il nous en avertit, s'efforce de prouver la supériorité de l'art pictural flamand et de signaler les superbes qualités de quelques-uns de nos peintres modernes. Nous espérons que M. Lequime ne tardera pas à nous donner en entier le résultat de ses longues années d'observations et de réflexions sur la peinture : les pages qu'il publie aujourd'hui nous en font entrevoir l'intérêt. M. Lequime, qui est un amateur et un collection neur, est aussi un critique très sincère et très perspicace, et ce qui n'est pas commun, très compétent dans la matière picturale proprement dite, qu'on néglige souvent pour parler, à propos de peinture, de ce qui n'est pas la peinture en soi. M . Lequime, au contraire, s'attache très étroitement à ce point de vue. Envisageant d'une manière spéciale cet aspect obvie de la peinture, par lequel elle apparaît avant tout comme la représentation des choses visibles, même quand ces choses ne sont que les mots d'un verbe spirituel, il étudie dans Rubens la plus haute expression des seules qualités picturales, qui n'ont pas été souvent célébrées d'une manière aussi explicite. Elles se résument en trois points qui contiennent, suivant M. Lequime, l'essence même de la vision rubénienne : Rubens dessine, non la ligne sèche et morte, mais le mouvement. Il a le contour ondoyant et noyé, conforme à l'apparence vraie des objets situés dans l'espace et dans la lumière. Enfin, et c'est le point le plus neuf de l'étude de M. Lequime et le point sur lequel il insiste le plus, ses colorations fondamentales retentissent et résonnent dans le tableau entier, particulièrement dans les fonds inséparables des figures, et créent ainsi l'harmonie, l'accord total, l'unité. En même temps qu'une contribution précieuse à l'étude de Rubens, l'excellente brochure de M. Lequime est une protestation passionnée, tou jours utile, contre les vices de l'enseignement académique, qui ne se gêne pas pour se réclamer de l'art flamand, tout en en méconnaissant les prin cipes constitutifs.

Il n'est pas de sottise qui n'ait été soutenue par un homme d'esprit. C'est ainsi que Grimm déclare : « Tout le monde est d'accord que le pastel est presque indigne d'être manié par un grand peintre ». M. Albert Dutry, le distingué chroniqueur artistique de l'Impartial de Gand, lui en garde rancune et s'insurge, preuves à l'appui, contre cette insolente 'affirmation. Tout en