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à sa bouche ; de sorte qu’il a besoin du secours de quelqu’un pour lui donner à manger. Il porte jour et nuit cet incommode fardeau, qui est plus ou moins pesant, suivant la nature du crime. Le poids commun du carcan : ou des cangues, est de cinquante-six livres ; mais il s’en trouve qui pèsent jusqu’à deux cents, et qui font tant de mal aux criminels, que, faute de nourriture et de sommeil, ils meurent quelquefois dans cette étrange situation. Il y a des cangues de quatre pieds carrés et de cinq à six pouces d’épaisseur.

Lorsqu’on a passé le cou du criminel dans ce pilori mobile, ce qui se fait devant les yeux du juge, on couvre les endroits par lesquels les deux pièces de bois se joignent, de deux longues bandes de papier, larges de quatre doigts, sur lesquelles on applique un sceau, afin que le cangue ne puisse être ouvert. Sur ces deux papiers on écrit en gros caractères la nature du crime et la durée du châtiment. Par exemple, « ce criminel est un voleur : c’est un débauché, un séditieux, un homme qui trouble la paix des familles : c’est un joueur. Il portera le cangue pendant trois mois dans un tel endroit. » Le lieu où ces misérables sont exposés est ordinairement la porte d’un temple ou de la ville, ou celle du tribunal même, ou le coin de quelque rue, ou la place publique. Lorsque le terme de la punition est expiré, les officiers du tribunal ramènent le criminel au mandarin, qui le délivre après une courte