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les derniers soupirs, on le met dans un riche fauteuil, qui est porté par six eunuques au milieu de la salle royale de Gin-tchi-tsien, c’est-à-dire au palais de la Merci et de la Prudence. On y place le corps sur un lit fort riche ; bientôt après on le renferme, avec une infinité de cérémonies et au son d’une musique funèbre, dans un cercueil qui coûte deux ou trois mille écus. Il est fait de bois nommé kong-sio-mo, ou bois de paon, qui tire ce nom de la ressemblance de ses veines avec les yeux de la queue du paon. Les Chinois assurent que ce bois préserve les corps de la corruption, et y laissent en effet un cadavre dans le même lieu pendant plusieurs mois, quelquefois pendant des années entières.

La pompe funèbre s’exécute dans le palais même, avec des cérémonies dont la description serait longue et fastidieuse. Après cette scène lugubre, on porte le corps à sa sépulture dans le bois impérial ; tel est le nom que les Chinois donnent aux tombeaux de leurs empereurs. L’air de grandeur qui règne dans ce lieu, les palais, les richesses et les ornemens dont il est accompagné, les murs qui l’environnent, le nombre de mandarins et de domestiques qui sont employés continuellement pour le service, et celui des soldats qui font la garde, tout caractérise des peuples dont l’imagination, beaucoup plus vive que la nôtre, porte ses vues jusque dans un ordre de choses, qui occupe peu la plupart des hommes.