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donner le droit de bourgeoisie aux personnes, et non pas aux mots.

La maxime d’état qui oblige envers lui ses sujets à une obéissance filiale lui impose aussi l’obligation de les aimer comme un père. C’est une opinion généralement établie parmi eux, qu’un empereur doit entrer dans tous les détails qui concernent le bien public. Ce n’est pas pour se divertir qu’il est placé dans ce rang suprême, il faut qu’il mette son divertissement à remplir les devoirs d’empereur, et à faire en sorte, par son application, par sa vigilance, par sa tendresse pour ses sujets, qu’on puisse dire de lui, avec vérité, qu’il est le père du peuple. Si sa conduite ne répond pas à cette idée, il tombe bientôt dans le dernier mépris, « Pourquoi le ciel, disent-ils, l’a-t-il placé au-dessus de nous ? N’est-ce pas pour nous servir de père et de mère ? »

Un empereur chinois s’étudie continuellement à soutenir cette réputation. Lorsqu’une province est affligée de quelque calamité, il se renferme dans son palais, il jeûne, il s’interdit tout plaisir ; et, se hâtant de diminuer les impôts par un décret, il emploie tous ses efforts an soulagement des malheureux. Il affecte, dans les termes du décret, de faire sentir combien il est touché de la misère de son peuple. « Je le porte dans mon cœur, dit-il ; je pleure nuit et jour sur ses malheurs, je pense sans cesse aux moyens de le rendre heureux. Enfin il emploie une infinité d’expres-