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Des révolutions de cette nature feraient naître en Europe des factions et des troubles ; mais elles ne produisent pas le moindre désordre à la Chine. Quand il arriverait même que ces renversemens de fortune fussent l’effet d’une haine personnelle ou de quelque autre passion violente, si le gouvernement est équitable dans les autres parties, le public prend peu d’intérêt à la disgrâce des grands. En ce point, la Chine ne diffère guère de nos gouvernemens d’Europe, mais beaucoup de ceux d’Asie, où le sort des princes et des ministres est une cause très-fréquente de révolutions.

Le pouvoir de l’empereur s’étend même sur les morts, qu’il punit ou récompense à son gré. Il leur confère divers titres d’honneur qui rejaillissent sur toute leur famille. En qualité de grand pontife, il peut en faire des saints, ou, suivant le langage de la Chine, des esprits nus.

On peut dire, en un mot, que le pouvoir de l’empereur s’étend presqu’à tout. Il peut changer la figure et le caractère des lettres, abolir les anciennes, en introduire de nouvelles ; il peut changer les noms des provinces, des villes et des familles ; il peut défendre l’usage de certaines expressions dans le langage, et faire revivre celles qui ont été abandonnées ; de sorte que son autorité prévaut sur l’usage même, dont les Grecs et les Romains croyaient l’empire absolu dans toutes les choses de cette nature. On sait qu’Adrien disait qu’il pouvait