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Tous les voisins ayant le même intérêt à se délivrer de leurs alarmes, emploient leurs biens et leur crédit auprès des mandarins, qui saisissent quelquefois aussi volontiers que les bonzes de si belles occasions pour tirer un profit considérable de la faiblesse du peuple. Ce qui doit paraître étrange, c’est qu’une superstition si généralement établie n’ait produit aucune loi qui ôte aux particuliers la liberté de suivre leur goût dans la forme et la position de leurs édifices. Il arrive souvent qu’un particulier, mécontent de son voisinage, prend un plaisir malin à se venger par le trouble qu’il y répand. Un jour quelques prosélytes chinois, qui n’avaient point encore secoué le joug de toutes leurs anciennes erreurs, vinrent avertir le supérieur de la mission qu’un de ses voisins, dans quelques réparations qu’il faisait à ses édifices, avait fait tourner le coin d’un mur contre le côté de l’église. Toute la ville informée de cette insulte, attendait curieusement quelle serait la conduite des Européens, et quelle méthode ils emploieraient pour détourner les calamités dont ils étaient menacés ; mais les missionnaires ayant reçu cet avis avec dédain, et paraissant tranquilles sur un si frivole sujet de terreur, le peuple ne douta point que, dans les pratiques de leur religion, ils n’eussent des méthodes comme celles de la Chine pour se garantir d’un mal si redoutable.

Cette superstition ne regarde pas seulement