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diocre, et de huit autres grains beaucoup plus gros. Le sommet est une boule allongée, de la forme d’une petite gourde. En roulant ces grains entre leurs doigts, ils prononcent les deux noms mystérieux, O-mi-to, Fo, dont l’auteur dit qu’ils n’entendent pas eux-mêmes le sens. Ils les accompagnent de cent génuflexions, après lesquelles ils retranchent un des cercles rouges qui sont imprimés sur leur feuille.

Les laïques invitent quelquefois les bonzes à les visiter dans leurs maisons, pour y faire leur prière et pour confirmer l’authenticité de ces cercles par leur sceau. Ils portent la feuille avec beaucoup de pompe, aux funérailles de leurs parens, dans une boîte qui est scellée aussi par les bonzes. Ils donnent à ce précieux bijou le nom de lou-in, c’est-à-dire passe-port pour le voyage de ce monde à l’autre. Ce trésor ne s’obtient qu’à prix d’argent ; mais personne ne regrette la dépense, parce qu’on le regarde comme le gage du bonheur futur.

Entre les temples des faux dieux, on en distingue plusieurs qui ne sont pas moins fameux par la magnificence et l’étendue des édifices que par l’étrange figure des idoles. Il y en a de si monstrueuses, que leurs adorateurs, effrayés de la seule vue, se prosternent en tremblant et frappent plusieurs fois la terre du front. Comme les bonzes n’ont point d’autre vue que de gagner de l’argent, et que toute la réputation qu’ils peuvent avoir acquise n’em-