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chargé particulièrement de la propagation de sa doctrine. Son maître lui avait ordonné, en mourant, de ne jamais employer d’argumens ni de preuves pour la soutenir, mais de mettre seulement à la tête des ouvrages qu’il devait publier : Telle est la doctrine que j’ai reçue. Cet ordre était fort sensé ; une pareille formule abrège beaucoup de disputes, et l’on est sûr, en ne raisonnant jamais, de n’être jamais convaincu.

Fo parle, dans un de ses livres, d’un maître plus ancien que lui, auquel les Chinois ont donné le nom d’O-mi-to, et les Japonais, par corruption, celui d’Amida. Ce personnage parut dans le royaume de Bengale, et les bonzes prétendent qu’il était parvenu à un si haut degré de sainteté, qu’il suffit à présent de l’invoquer pour obtenir du ciel le pardon des plus grands crimes. Aussi les Chinois de cette secte ont-ils continuellement ces deux noms dans la bouche : O-mi-to, Fo ! Ils sont persuadés qu’après avoir invoqué ces deux dieux, non-seulement ils sont parfaitement purifiés, mais qu’ils peuvent ensuite lâcher la bride à leurs passions, parce qu’ils ont toujours la facilité de laver leurs taches au même prix. Les derniers discours de Fo firent naître une secte d’athées entre les bonzes. Une troisième secte entreprit de concilier les deux doctrines, par la distinction qu’elle mit entre l’extérieure et l’intérieure. L’une, suivant cette idée, est plus à la portée du peuple, et prépare les esprits à