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rin, qui est à peu près pour eux ce que le latin est en Europe pour les ecclésiastiques et les savans, et que l’auteur de l’Orphelin de la Chine appelle

Du conquérant tartaLa langue sacrée,
Du conquérant tartare et du peuple ignorée.


Enfin celui des livres, qui est fort différent du discours familier : il ne s’emploie jamais que pour écrire, et ne peut être entendu sans le secours des lettres ; mais ceux à qui l’étude facilite l’intelligence de ce style y trouvent beaucoup de netteté et d’agrément. Chaque pensée est ordinairement exprimée par cinq ou six caractères ; l’oreille la plus délicate n’y rencontre rien de choquant, et la variété des accens en rend le son fort doux et fort harmonieux. La différence entre les livres qu’on publie dans ce dialecte, et ceux qui portent le nom de king, consiste dans le sujet, qui n’est pas si relevé, et dans le style, qui n’a pas la même grandeur et la même précision. Il faut passer par quantité de degrés avant d’arriver à la majestueuse brièveté qu’on admire dans les kings. On n’emploie point de ponctuation pour les sujets sublimes : on laisse aux savans, pour qui ces ouvrages sont destinés, le soin de juger où le sens se termine, et les habiles gens ne s’y trompent jamais.

Les Chinois ont encore une autre sorte de langage et un autre caractère, qui a servi à la composition de quelques livres, que les savans