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Son compagnon, qui n’eut point autant de part qu’il se l’était promis au fruit de cette imposture, découvrit ensuite le complot ; mais il était trop tard pour sauver l’argent du malade : ce tour était digne de l’Europe.

Les Chinois font grand cas des topiques ; ils appliquent aux malades, en divers endroits, des aiguilles brûlantes, ou des boutons de feu. Un Chinois disait un jour à un Européen : « On vous traite en Europe avec le fer (il faisait allusion à la saignée) ; ici, nous sommes martyrisés avec le feu. Il n’y a point d’apparence que cette mode passe jamais, parce que les médecins ne sentent point le mal qu’ils font aux malades, et qu’ils ne sont pas moins payés pour nous tourmenter que pour nous guérir. »

Au lieu d’employer des apothicaires pour la composition des remèdes, la plupart des médecins chinois se chargent eux-mêmes de ce soin : ils s’étonnent que les Européens se reposent du principal point de leur santé sur des gens qui n’ont pas d’intérêt à guérir un malade, et qui s’embarrassent peu de la qualité de leurs drogues, pourvu qu’ils trouvent du profit à les vendre. Tout le monde est libre d’exercer la médecine comme les arts mécaniques, sans examen de doctrine, et sans avoir pris les degrés. Cette licence multiplie beaucoup les charlatans, d’autant plus que le peuple, souvent trompé par leur ignorance, ne se lasse point de les employer.