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tout mouvement de vivacité. Ces écarts passent à la Chine pour des défauts contraires à l’honnêteté ; non que les Chinois ne soient aussi ardens et aussi vifs que nous ; mais ils apprennent de bonne heure à se rendre maîtres d’eux-mêmes.

Leur modestie est surprenante : les lettres paraissent toujours avec un air composé, sans accompagner leurs discours du moindre geste. Les femmes sont encore plus réservées : elles vivent constamment dans la retraite, avec tant d’attention à se couvrir, qu’on ne voit pas même paraître leurs mains au bout de leurs manches, qui sont fort longues et fort larges. Si elles présentent quelque chose à leurs plus proches parens, elles le posent sur une table, et leur laissent la peine de le prendre : elles sont fort choquées de voir les pieds nus à nos saints dans les tableaux.

Quoique les Chinois soient naturellement vindicatifs, surtout lorsqu’ils sont animés par l’intérêt, ils ne se vengent jamais qu’avec méthode, sans en venir aux voies de fait. Ils dissimulent leur mécontentement, et gardent si bien les apparences, qu’on les croirait insensibles aux outrages ; mais l’occasion de ruiner leur ennemi se présente-t-elle, ils la saisissent sur-le-champ. Les voleurs mêmes n’emploient point d’autre méthode que l’adresse et la subtilité. Il s’en trouve qui suivent les barques des voyageurs ou des marchands, et qui se coulent parmi ceux qui les tirent sur