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À Pékin, le P. Grimaldi, missionnaire jésuite, fit voir à Gemelli une ceinture jaune, dont l’empereur lui avait fait présent, de laquelle pendait un étui de peau de poisson, qui contenait deux petits bâtons, et les autres ustensiles dont les Chinois se servent à table. Un présent de cette nature est d’autant plus précieux à la Chine, qu’il s’attire le respect de tout le monde, et qu’à la vue de cette couleur chacun est obligé de se mettre à genoux et de baisser le front jusqu’à terre, pour attendre qu’il plaise à celui qui la porte de la cacher. Gemelli rapporte à cette occasion qu’un mandarin de Canton ayant prié un franciscain de lui faire présent d’une montre, et le missionnaire n’en ayant point à lui donner, le mandarin se trouva si offensé, qu’il publia une déclaration contre la religion chrétienne pour faire connaître qu’elle était fausse. Cette démarche ayant alarmé les chrétiens chinois, ils en informèrent le missionnaire, qui, dans le mouvement de son zèle, se rendit à la place publique, et déchira la déclaration. Le mandarin, irrité de sa hardiesse, le contraignit d’abandonner la ville. Dans cette conjoncture, le P. Grimaldi passant à Canton pour se rendre en Europe, le mandarin vint lui rendre ses respects, parce qu’on n’ignorait pas dans quel degré de faveur il était à la cour impériale. Il prit, pour le recevoir, le bout de sa ceinture jaune à la main ; et s’expliquant d’un air ferme, il lui reprocha d’avoir osé condamner la reli-