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la forme d’un dragon ou d’un grand poisson, dont le pouvoir s’étendait sur tout le pays, et qui avait tant d’aversion pour l’odeur des viandes rôties et bouillies, qu’aussitôt qu’il en ressentait la moindre impression, il suscitait des tempêtes qui submergeaient infailliblement les vaisseaux. Les ambassadeurs eurent la complaisance d’entrer dans leurs craintes superstitieuses, et de se contenter ce jour-là d’un dîner froid. Vers midi, on passa devant deux piliers qui sont placés au milieu de la rivière pour servir de division entre la province de Kiang-si et celle de Nankin.

Nankin, sans contredit la plus belle ville de la Chine, est située à trente-cinq milles de Tay-tong ou Tay-ping, sur la rive est du Kiang, au 32e. degré de latitude. Sa situation est charmante, et le terroir d’une merveilleuse fécondité. La rivière traverse toute la ville et se divise en plusieurs canaux couverts de ponts. Quelques-uns de ces bras sont navigables pour les plus grandes barques. La cour impériale avait fait long-temps sa résidence à Nankin, lorsqu’en 1368 l’empereur Hong-vou prit le parti de la transporter à Pékin, pour se mettre en garde contre l’invasion des Tartares. Aujourd’hui Nankin est le séjour du gouverneur des provinces méridionales.

Les principales rues de Nankin ont vingt-huit pas de largeur : elles sont droites et bien pavées. Il n’y a point de ville au monde où l’ordre soit plus exact pour la tranquillité de