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et qu’elle ne brûle pas, je me ferai chrétien. » Le père Corsi répondit que cette expérience blessait la raison, et que le ciel n’était pas obligé de faire des miracles chaque fois que les hommes en demandaient ; que c’était le tenter, et que le choix des occasions n’appartenait qu’à lui : mais qu’il offrait d’entrer lui-même dans le feu pour preuve de la vérité de la foi. L’empereur n’accepta point cette offre. Cependant tous les courtisans firent beaucoup de bruit ; et, demandant que la vérité de notre religion fût éprouvée par cette voie, ils ajoutèrent que, si le crucifix brûlait, le père Corsi serait obligé d’embrasser le mahométisme. Sultan Coroné apporta l’exemple de plusieurs miracles qui s’étaient faits dans des occasions moins importantes que celle de la conversion d’un si grand monarque, et conclut que, si les chrétiens refusaient cette expérience, il ne se croyait pas obligé de s’en rapporter à leurs discours. »

Un charlatan de Bengale offrit à l’empereur un grand singe qu’il donnait pour un animal divin. On a fait remarquer effectivement dans d’autres relations que plusieurs sectes des Indes attribuent quelque divinité à ces animaux. Comme il était question de vérifier cette qualité par des preuves, l’empereur tira d’un de ses doigts un anneau, et le fit cacher dans les vétemens d’un de ses pages. Le singe, qui ne l’avait pas vu cacher, l’alla prendre dans le lieu où il était. L’empereur ne s’en rapportant