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et du tabac. Pendant les premiers jours, il garda beaucoup de réserve ; et l’air de gravité qu’il affecta dans ses manières et dans son langage disposa tout le monde à le croire homme de qualité. Ensuite il fit entendre aux Anglais, quoique par degrés et dans des termes ambigus, qu’il était le comte de Sarjedo : Mais, en approchant de Madras, il prit ouvertement ce nom ; et, pour expliquer son déguisèment, il ajouta que le prince régent de Portugal, n’ayant pu équiper une flotte assez nombreuse pour le conduire aux Indes avec la pompe et la majesté convenables à son rang, lui avait ordonné de partir incognito, parce que le terme de Mendoza était tout-à-fait expiré.

Les Anglais ajoutèrent de nouveaux honneurs à ceux qu’ils lui avaient déjà rendus, et le traitèrent avec les respects et les cérémonies qu’on observe à l’égard des vice-rois. Ils s’applaudissaient du bonheur qu’ils avaient eu de le porter aux Indes, ne doutant point que sa reconnaissance pour les services qu’ils lui avaient rendus ne le disposât, pendant le temps de son gouvernement, à rendre service à la compagnie, et particulièrement à ceux qui l’avaient obligé. Mais, pour l’exciter encore plus à les favoriser dans l’occasion, à peine fut-il descendu au rivage, que tout le monde s’empressa de lui offrir tout l’argent dont il avait besoin, et c’était justement à quoi le faux comte s’était attendu. Il en prit de toutes mains, des