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DES VOYAGES


geux, nous faisions route vers la terre ; nous en étions à trois lieues, lorsque nous aperçûmes une pirogue et deux hommes qui ramaient vers nous : nous supposâmes que le dernier orage les avait entraînés au large, et nous ralentîmes notre marche afin de les recueillir. Ces pauvres malheureux étaient tellement épuisés de fatigue, que, si l’un des insulaires qui se trouvaient à bord, s’apercevant de leur faiblesse, ne se fût précipité dans l’embarcation afin de leur donner du secours, ils auraient à peine eu la force de s’attacher à la corde que nous leur jetâmes. Nous eûmes bien de la peine à les hisser à bord, surtout avec un enfant d’environ quatre ans, qu’ils avaient attaché sous des traverses extérieures de la pirogue où on l’avait tenu assez long-temps, n’ayant que la tête au-dessus de l’eau. Ils nous dirent qu’ils étaient partis de l’île la veille au matin, et que depuis ce moment ils n’avaient ni bu ni mangé, Nous leur donnâmes à manger avec les précautions, usitées en pareil cas ; on chargea l’une des femmes de prendre soin de l’enfant, et le lendemain ils se portaient tous fort bien.

» À minuit il survint un coup de vent. Nous reconnûmes, le 8, à la pointe du jour, que le mât de misaine avait consenti de nouveau ; les jumelles qu’on avait posées à la tête durant notre relâche à Noutka avaient éclaté ; les diverses parties étaient en si mauvais état, qu’il devint absolument nécessaire de les remplacer, et par conséquent d’enlever le mât.