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HISTOIRE GÉNÉRALE

» Il y a deux époques de l’année où ce divertissement, ou plutôt ce travail, est surtout dangereux ; au printemps, lorsque les ours sortent pour la première fois de leurs tanières, après avoir passé l’hiver sans prendre de nourriture : car on assure universellement ici que ces animaux sont réduits à sucer leurs pattes durant l’hiver ; ils sont très-redoutables en cette saison : si la gelée est forte, et si la glace, qui n’est pas encore rompue dans le lac, les prive de leurs moyens de subsistance, ils ne tardent pas alors à devenir affamés et féroces. Ils ont l’odorat très-fin ; ils sentent de loin les Kamtchadales, et ils les poursuivent ; comme ils rôdent hors de leurs sentiers ordinaires, ils attaquent souvent des malheureux qui ne se trouvent pas sur leurs gardes ; et, dans ce cas, les chasseurs du pays, ne sachant point tirer au vol ou à la course, et étant toujours obligés d’avoir leurs fusils posés sur un point d’appui, sont assez fréquemment dévorés par ces animaux. L’autre saison de l’année où on ne les rencontre pas sans péril est celle du rut.

» La chasse fournit un grand nombre de traits qui prouvent la tendresse de ces animaux pour leurs petits, et celle de ces derniers pour leur mère. Les chasseurs mettent à profit ces observations ; ils ne s’avisent pas de tirer un ourson lorsque sa mère est dans les environs, car elle porte la fureur jusqu’à la frénésie ; si son ourson est blessé, et si elle dé-