Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 30.djvu/259

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
251
DES VOYAGES


aux lacs, et parmi les joncs, les longues herbes et les fougeraies placés au bord de l’eau. Lorsque le lieu de l’embuscade est déterminé, les chasseurs fixent en terre les béquilles sur lesquelles ils pointent leurs fusils ; ils s’agenouillent ensuite, ou se couchent par terre, selon que l’endroit où ils se tiennent cachés est plus ou moins couvert ; et armés d’ailleurs d’un épieu qu’ils portent à leur côté, ils attendent leur proie. Ces précautions, qui ont surtout pour objet de ne pas manquer leur coup, sont très-convenables : d’abord la poudre et le plomb se vendent si cher au Kamtchatka, qu’un ours ne vaut pas plus de quatre ou cinq cartouches ; et, ce qui est plus important encore, si le premier coup ne met pas l’ours hors de combat, il en résulte souvent des suites funestes ; car l’ours se porte sur-le-champ : vers le lieu d’où viennent le bruit et la fumée, et il attaque ses ennemis avec beaucoup de fureur. Il est impossible aux chasseurs de recharger : l’animal est rarement à plus de trente-six à quarante-cinq pieds de distance lorsqu’ils la tirent ; s’ils ne le renversent pas, ils saisissent à l’instant même leur épieu pour se défendre ; et s’ils ne lui portent pas un premier coup mortel quand il fond sur eux, leur vie est en danger. Si l’ours pare le coup (ce que la force et l’agilité de ses pattes le mettent souvent en état de faire), et s’il se précipite sur les chasseurs, le combat devient alors inégal, et ils se croient heureux s’il n’y a qu’un seul d’entre eux de tué.