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DES VOYAGES

» Nous nous adressâmes secrètement le lendemain au marchand Fedositch ; nous lui demandâmes du tabac pour les matelots, qui depuis plus d’un an manquaient de cet objet. Le major fut instruit sur-le-champ de notre démarche, ainsi que de toutes les autres du même genre ; et bientôt nous trouvâmes dans notre maison quatre sacs de tabac qui pesaient chacun plus de cent livres. M. Behm nous chargea de les offrir aux matelots, en son nom et en celui des soldats qu’il commandait. Il nous envoya en même temps vingt pains d’un très-beau sucre, et autant de livres de thé : il avait su que nous n’en avions plus à bord, et il nous pria de les présenter aux officiers. Madame Behm nous envoya d’ailleurs du beurre frais, du miel, des figues, du riz, et quelques autres comestibles pour le capitaine Clerke ; elle nous recommanda de lui dire combien elle s’intéressait à sa santé, et combien elle désirait d’apprendre sa guérison. Nous essayâmes en vain de mettre des bornes à toutes ces largesses du gouverneur. Je m’occupai d’autant plus de cet objet, que j’étais convaincu qu’on nous donnait, non pas une partie de la provision de la garnison, mais la provision presque entière. Le major nous répondit toujours que nous avions beaucoup souffert, et que nous devions éprouver des besoins. La longueur du temps que nous venions de passer en mer sans avoir touché à aucun port connu lui parut si inconcevable, qu’il eut besoin du témoignage de nos