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HISTOIRE GÉNÉRALE

extrême propreté. Il eut la politesse de me donner un de ses vêtemens complets, et lorsque j’eus changé d’habits, il nous pria de nous mettre à table ; je suis persuadé qu’il nous servit ce qu’il avait de meilleur, et vu le peu de temps qu’il avait eu pour ordonner le repas, nous fûmes surpris de faire si bonne chère. Ses gens n’avaient pas eu le loisir de préparer de la soupe et du bouilli ; mais on nous servit en place des tranches de bœuf froides sur lesquelles on versa de l’eau chaude. On apporta ensuite un gros oiseau rôti, d’une espèce que je ne connaissais pas, mais d’un goût excellent. Quand nous en eûmes mangé une partie, on l’ôta et il fut remplacé par du poisson apprêté de deux manières différentes : le reste de l’oiseau, dont on avait fait un plat d’entremets, reparut bientôt. Nous bûmes du quass, liqueur dont on fait beaucoup d’usage en Russie, et ce fut ce qu’il y eut de plus mauvais dans notre dîner. La femme du sergent apporta elle-même plusieurs des plats, et on ne lui permit pas de manger avec nous. À la fin de notre diner, durant lequel il n’est pas besoin de remarquer que la conversation se borna à quelques révérences et à d’autres politesses réciproques, nous essayâmes de faire comprendrez notre hôte les motifs et l’objet de notre arrivée dans ce port. Il avait probablement été instruit par Ismyloff, et il parut nous entendre assez bien ; mais malheureusement aucun des habitans de l’ostrog ne parlait d’autre langue que le russe et le kamtchadale, et nous