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HISTOIRE GÉNÉRALE


pagnèrent. Ne sachant qu’imaginer d’après cette étrange conduite, nous continuâmes avec beaucoup de circonspection notre marche vers l’ostrog, et quand nous en fumes à un quart de mille, nous aperçûmes un corps d’hommes armés qui s’avançait vers nous. Afin de leur donner le moins d’alarme qu’il serait possible, et de montrer les dispositions les plus pacifiques, j’ordonnai aux deux matelots qui portaient des gaffes de se tenir derrière, et nous nous avançâmes, M. Webber et moi. Le détachement russe, composé d’environ trente soldats, était conduit par un homme de bonne mine, qui avait une canne à la main. Il s’arrêta à quelques pas de nous, et il rangea sa troupe en bataille. Je lui remis les lettres d’Ismyloff ; je tâchai de lui faire comprendre que nous étions Anglais, et que nous avions apporté ces papiers d’Ounalachta ; mais je sus par la suite qu’il ne m’avait pas compris. Après nous avoir examinés bien attentivement, il nous fit prendre la route du village : il nous mena en silence et avec beaucoup d’appareil ; il ordonna souvent à sa petite troupe de s’arrêter et d’exécuter diverses évolutions ; vraisemblablement afin de nous montrer que, si nous étions assez téméraires pour employer la violence, nous aurions à combattre des hommes qui savaient leur métier.

« Quoique mes habits fussent très-mouillés, quoique le froid produisît un frisson dans tous mes membres, et que ces délais survinssent