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DES VOYAGES


beaucoup qu’on ne puisse nous reprocher ée leur avoir causé un si affreux malheur.

» Comme notre principal objet en relâchant à cette île était de faire de l’eau, on m’envoya à terre de bonne heure dans l’après-midi, avec la pinasse et le canot remplis de barriques. Outre le canonnier de la Résolution, chargé d’acheter des vivres, j’emmenai un détachement de cinq soldats de marine. Arrivés sur le rivage, une foule nombreuse nous reçut d’abord d’une manière très-amicale, mais elle devint extrêmement incommode dès que nous eûmes débarqué les futailles. L’expérience m’ayant fait voir combien il est difficile de réprimer les habitans de ces mers, sans recourir à l’autorité des chefs du pays, je fus très-fâché d’apprendre que tous les chefs étaient dans une autre partie de l’île. Nous ne tardâmes pas en effet à avoir besoin de leur secours, car il me fut très-difficile de former, selon notre usage, un cercle pour la commodité et la sûreté de ceux qui faisaient les échanges. J’en vins à bout cependant, et je plaçai des sentinelles pour écarter la populace ; mais j’apercus bientôt un insulaire qui, saisissant la baïonnette du fusil d’un de nos soldats, s’efforçait de s’en emparer. Il lâcha prise, et il se retira du moment où j’approchai ; il revint un instant après, tenant d’une main une pique et de l’autre un pahoua, et ses compatriotes eurent bien de la peine à empêcher de se battre contre le soldat : une légère égratignure qu’il reçut de celui-ci, qui voulait l’écarter