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gens, et n’en prend qu’un petit nombre à sa suite.

Les domestiques de la maison l’ayant introduit dans la salle d’audience, il y trouve le maître assis, qui ne fait pas le moindre mouvement pour quitter sa position ; il se met à genoux devant lui, baise la terre, frappe des mains, et souhaite à son seigneur une longue vie avec toutes sortes de prospérités : il répète trois fois cette cérémonie, après quoi l’autre, sans se remuer, lui dit de s’asseoir, et le fait placer vis-à-vis de lui sur une natte ou sur une chaise, suivant la manière dont il est assis lui-même ; il commence alors la conversation : lorsqu’elle a duré quelque temps, il fait signe à ses gens d’apporter des liqueurs, et les présente à son hôte ; c’est le signal de la retraite. L’étranger recommence alors ses génuflexions avec les mêmes complimens, et se retire ; les domestiques de la maison le conduisent jusqu’à la porte, et le pressent de remonter dans son hamac ; mais il s’en défend, et de part et d autre on se prosterne comme à l’arrivée ; il monte ensuite dans le hamac ; les instrumens recommencent à jouer, et le convoi se remet en marche dans le même ordre qu’il est venu. Il paraît par ce détail, que la politesse des inférieurs est très-soumise, et celle des supérieurs très-humiliante. Quoi qu’en disent les voyageurs, ce n’est pas là le chef-d’œuvre de l’urbanité ; celle de l’Europe est infiniment mieux entendue, puisqu’elle consiste à établir,