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Les chefs, qui ne l’ignorent pas, désirent beaucoup d’avoir des coffres ; ils semblaient mettre un prix extrême à un petit nombre laissés dans l’île par les Espagnols, et ils nous en demandaient d’autres sans cesse. J’en fis faire un pour O-tou ; il le voulut de huit pieds de long, de cinq de large et de trois de profondeur. Les serrures et les verroux ne suffiront pas pour écarter les voleurs ; mais il est assez grand pour que deux hommes puissent coucher dessus pendant la nuit pour le garder.

» Nous savions un peu la langue du pays ; O-maï nous servait d’ailleurs d’interprète, et cependant il est assez singulier que nous n’ayons pu découvrir l’époque précise de l’arrivée des Espagnols et de la durée de leur séjour. En multipliant nos questions sur ce point, nous reconnûmes de plus en plus que ces insulaires sont incapables de noter ou de se rappeler la date des événemens anciens, surtout s’il s’est écoulé dix ou vingt mois. L’inscription que nous trouvâmes sur la croix, et les détails que nous donnèrent les plus intelligens des Taïtiens me firent juger cependant que deux vaisseaux arrivèrent à Oheitepeha en 1774, peu de temps après mon départ de Matavaï, qui eut lieu au mois de mars de la même année. Quelques insulaires nous dirent que, lorsque les Espagnols eurent débarqué les bois de la maison et un petit nombre d’hommes, ils remirent à la voile pour me chercher, et qu’ils revinrent dix jours après ; mais j’en doute,