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leur naturel. Des troupes nombreuses nous suivaient et venaient près de nos canots ; mais ils se précipitaient dans les flots dès qu’ils apercevaient la lueur de l’amorce, ou même dès qu’ils voyaient qu’on les couchait en joue. Les femelles défendent leurs petits jusqu’à la dernière extrémité et aux dépens de leur vie, dans l’eau ou sur la glace. Les jeunes ne quittaient pas leurs mères, lors même qu’elles étaient mortes ; en sorte que, si nous avions tué les unes, nous étions sûrs des autres.

» Le 27, comme il y avait peu de vent, j’allai avec des canots pour examiner la glace de près. Je la trouvai composée de morceaux flottans, de diverses grandeurs, et tellement réunis, que je pouvais à peine pénétrer dans la bordure extérieure avec un canot ; elle présentait aux vaisseaux une barrière aussi impénétrable que des rochers. Je remarquai qu’elle était partout pure et transparente, excepté dans la partie supérieure, qui se trouvait un peu poreuse. Je jugeai que c’était de la neige glacée, et il me parut qu’elle s’était toute formée à la mer ; car, outre qu’il est invraisemblable ou plutôt impossible que des masses si énormes flottent dans des rivières où il y a à peine assez d’eau pour un canot, nous n’aperçûmes sur ces glaçons aucune des choses que produit la terre, et on aurait dû y en voir, si elle s’était formée dans des rivières grandes ou petites. Les morceaux qui composaient la bordure extérieure de la plaine avaient