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Tchoutskis, dont on verra plus bas les heureux effets, s’éloigna de la côte d’Asie ; il se rapprocha de celle d’Amérique, et lorsqu’il l’eut ralliée, il fit route au nord, puis à l’est.

Le 17 avant midi, il aperçut à l’horizon, dans le nord, une clarté pareille à celle que produit la réflexion de la glace, et qu’on appelle communément le clignotement de la glace. N’imaginant pas rencontrer des glaces sitôt, il y fit peu d’attention. Cependant l’âpreté de l’air et l’obscurité du ciel semblaient annoncer un changement brusque depuis deux ou trois jours. Une heure après, la vue d’une vaste plaine de glace ne lui laissa plus de doute sur la cause de la clarté de l’horizon. Ne pouvant, à deux heures et demie, aller plus avant, il revira près des bords de la glace, par 70° 41′ de latitude. La glace était absolument impénétrable, et elle se prolongeait du sud-ouest à l’est aussi loin que pouvait s’étendre la vue. Il rencontra dans ces parages une grande quantité de morses ; il y en avait dans l’eau ; le plus grand nombre occupait la glace. Il en tua plusieurs.

« Leur graisse, dit-il, approche de la saveur de la moelle ; mais elle devient rance en peu de jours, si on ne la sale pas ; lorsqu’elle est salée, elle se conserve bien plus long-temps. La chair est grossière et noire ; le goût en est fort ; le cœur est presque aussi bon que celui d’un bœuf. Quand la graisse est fondue, elle donne beaucoup d’huile, qui brûle très-bien dans les lampes ; les peaux, qui sont très-