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que accident à ma conserve, qu’elle n’eût fait une voie d’eau, par exemple. Un canot que je lui envoyai revint bientôt avec le capitaine Clerke. Je sus que des naturels montant quatre pirogues étaient venus à l’arrière de son vaisseau après l’avoir suivi assez long-temps. L’un d’eux ôta son chapeau, fit la révérence, et plusieurs autres signes à la manière des Européens. On lui jeta une corde à laquelle il attacha une petite boîte, et quand il vit que l’équipage de la Découverte tenait la boîte, il prononça quelques mots qu’il accompagna de différent gestes, et il emmena les pirogues. Les gens du capitaine Clerke, n’ayant pas imaginé que la boîte contînt quelque chose, ne l’ouvrirent qu’après le départ des naturels, et encore ce fut par hasard ; ils y trouvèrent un morceau de papier plié soigneusement, sur lequel il y avait de l’écriture ; on supposa que cette écriture était en langue russe. Nous remarquâmes en tête une date de 1778, et le corps du billet indiquait l’année 1776. Il n’y avait à bord personne d’assez habile pour déchiffrer l’alphabet de l’écrivain ; les chiffres arabes qu’offrait la lettre annonçaient assez que nous avions été précédés dans cette partie du monde par des hommes qui connaissaient les arts de l’Europe ; et l’espoir de rencontrer bientôt des négocians russes ne pouvait manquer de nous faire un grand plaisir ; car nous étions réduits depuis long-temps à la société des sauvages du grand Océan et de l’Amérique septentrionale.